Budget primitif 2024

C’est dans un contexte marqué par de profonds bouleversements que le budget départemental 2024 a été adopté jeudi 21 mars dernier.  

En préambule il convient de rappeler le contexte interne de l’adoption de ce budget. Initialement, celui-ci a été adopté après une vingtaine d’heures de débats le vendredi 9 février. Toutefois, l’absence constatée de la maquette budgétaire suite à un défaut de téléchargement a conduit à la décision recommencer le processus d’adoption :

  • Le débat d’orientation budgétaire qui ne doit pas intervenir plus de 2 mois avant le vote du budget primitif. Les orientations budgétaires ayant eu lieu en décembre il a fallu reprendre cette étape ainsi que la réunion des commissions qui doivent précéder ;  
  • Les commissions puis le vote du budget primitif.

Le budget a donc pu être adopté en toute légalité et de façon sincère.

Comme chaque session, les président.es de groupe ont la parole dans le cadre d’une intervention de politique générale.

Marion Le Frène, coprésidente du groupe EFC, a pris la parole dans un discours résolument en soutien avec le monde enseignant.

Ces dernières semaines, la crise agricole a occupé le devant de la scène dans les médias. Cependant, une autre profession se trouve elle-aussi confrontée à un mal-être profond, celle des enseignantes et enseignants. Entre épuisement professionnel et perte de sens du métier, les acteurs de ce service public si essentiel, sont au bord de la rupture. Et ce n’est pas la méthode choisie par l’ancien ministre de l’éducation nationale pour relever le niveau des élèves qui va arranger les choses, tant celle-ci est décriée. 

Les collèges sont particulièrement visés dans les projets gouvernementaux. Notre collectivité est donc particulièrement concernée par les annonces successives. Si nous ne nions pas la nécessité de réformer, ce n’est pas la direction que nous aurions choisie !

Les groupes de niveau tout d’abord, qui, au-delà d’être une erreur pédagogique, vont nécessiter selon le syndicat des chef.fes d’établissement SNPDEN-UNSA, la création de 9 000 postes dès la rentrée prochaine, là où le gouvernement n’en propose que 2330. Et c’est sans compter sur le déficit actuel de professeur.es en mathématiques et français, disciplines dans lesquelles il y a de moins en moins de candidat.es à se présenter aux concours. Où va-t-on trouver ces enseignants ? 

La création de groupes de niveau va également engendrer des contraintes techniques et matérielles supplémentaires pour les collèges. Est-ce que ce sera aux départements d’en subir les conséquences ?

Et à cela, s’ajoute en Bretagne et en Ille-et-Vilaine, un manque de professeurs dans les filières bilingues français-breton, en raison d’une offre de formation insuffisante, avec pour conséquence de ne pas atteindre les objectifs de la Convention Etat-Région dans ce domaine. 

Le redoublement ne peut être non plus considéré comme une bonne solution. Car à l’instar des groupes de niveau, cette mesure est jugée inefficace par la communauté scientifique et éducative, voire à l’impact négatif sur l’apprentissage et l’estime de soi.  Qui plus est, le redoublement est un vecteur d’accroissement de la reproduction des inégalités sociales, là où notre collectivité œuvre pour renforcer la mixité sociale dans nos collèges. Et que dire du port de l’uniforme, qui serait la solution pour améliorer le climat scolaire, limiter le harcèlement et renforcer la cohésion entre élèves ! Penser traiter de ces sujets en s’attelant à la forme plutôt qu’au fond relève d’un réel manque de sérieux. Les uniformes ne feront que cacher les inégalités plutôt que de les combattre. 

L’évolution voulue pour le brevet des collèges, en faisant de son obtention un préalable pour entrer en 2de, va enfoncer le clou pour les élèves les plus défavorisés. Car c’est bien dans le réseau d’éducation prioritaire que le taux de réussite est le plus faible. Ces élèves seront encore plus stigmatisés, avec un risque avéré de provoquer un décrochage scolaire chez ces derniers. Quoi qu’il en soit, la question des moyens (humains et matériels) se pose à nouveau, ainsi que la capacité de l’Education Nationale à être opérationnelle pour la rentrée 2025. Car en la matière, M Attal se doit d’avoir une vision réaliste et non pas élitiste de ce qu’il propose.

Quant aux baisses de budget annoncées – près de 691 millions d’euros supprimés pour l’Éducation nationale – elles ne sont pas faites non plus pour nous rassurer. 

Les réformes doivent se penser avec celles et ceux qui sont chargé.es de les appliquer. Les personnel.le.s de l’éducation nationale attendent du respect et de la reconnaissance et non du mépris. Notre groupe tient à apporter son soutien aux enseignants et enseignantes, aux personnel.le.s administratifs et éducatifs des collèges mais aussi aux parents, tous les parents, attentifs à l’avenir de leurs enfants et inquiets des décisions, parfois contradictoires, qui sont annoncés depuis plusieurs mois. 

Il est urgent de remettre l’éducation au cœur de notre projet de société pour permettre aux élèves de s’épanouir dans leurs apprentissages et de s’émanciper. Nous resterons vigilants et vigilantes sur les prochaines décisions de la ministre actuelle et espérons, sans trop d’espoir, qu’elle mettra la lutte contre le déterminisme social et pour le bien-être des enfants au centre de son action. 

Cette nouvelle session budgétaire vient confirmer la nécessaire prudence dont a fait preuve la majorité départementale dans son travail budgétaire, si on en croit les dernières tendances de diminution de nos droits de mutation à titre onéreux (DMTO – ce sont des impôts liés aux transactions immobilières) en 2024 et l’accroissement des besoins et allocations sociales, entres autres, l’augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA depuis plusieurs mois. Le constat reste donc le même nous nous évertuons à faire toujours mieux pour de pérenniser nos actions mais avec moins de possibilités.

REPARTITION DES RECETTES

DEPENSES

La réalité actuelle est que nous sommes parvenus à boucler un budget en équilibre et sincère dont les ambitions sont intactes, mais à quel prix ? Celui de la baisse significative de notre épargne nette avec un atterrissage à 2.8 millions contre 27.1 millions en 2023. Nous devons ainsi faire face à une grande incertitude.

Cela a été rappelé plusieurs fois lors des différents temps publics du département, il s’agit là de la réalité de l’ensemble des départements français, quelle que soit leur couleur politique.

Nous sommes conscients et conscientes que les départements sont aujourd’hui tributaires des aléas économiques rendant fortement volatiles leurs recettes et les choix politiques du gouvernement dont le soutien aux collectivités ne sont pas au rendez-vous. C’est sans compter sur son manque de cap et d’ambition sur un certain nombre d’enjeux importants : le grand âge, les orientations sur l’emploi ou encore le logement qui animent d’ailleurs fortement les débats de l’assemblée départementale. On nous parle dans la presse de nouvelles attaques concernant les APL, ce qui aurait encore une fois des conséquences dramatiques pour les foyers les plus précaires et les bailleurs sociaux.

Pourtant, les défis sociaux auxquels nous faisons face aujourd’hui n’ont jamais été aussi importants au regard de notre position de chef de file des solidarités.

Nous avons fait le choix au travers de ce budget 2024 de rester mobilisés auprès des plus vulnérables : avec une augmentation de +5% sur les budgets personnes âgées / personnes en situation de handicap, +6.7% pour la protection de l’enfance et +7% pour l’insertion. De même, les besoins financiers d’un certain nombre de nos grands comme nos petits partenaires publics et associatifs ont été mesurés et prises en compte dans la mesure du possible dans ce travail budgétaire. Car oui, la soutenabilité de nos politiques locales dépend aussi d’un partenariat fort, qu’il nous faut maintenir, à minima.

Ces partenaires et comme les habitant.es attendent aussi de nous de forts investissements : dans les communes, dans les collèges, pour le Service Départemental d’Incendie et Secours, pour les mobilités actives… Si nous parvenons à maintenir un taux d’investissement fort cette année, il sera sans doute compliqué de maintenir ce cap à l’avenir si nous ne retrouvons pas des marges budgétaires.  

L’heure est grave pour des départements. Compte tenu de cette situation plus que difficile, nous remercions l’ensemble des services du département pour le travail accompli et à venir cette année et nous assumons de porter un budget qui accompagne avec ambition nos concitoyennes et concitoyens au quotidien et tout au long de leur vie.