Session départementale des 7, 8 et 9 février 2024


1ère session de l’année consacrée à l’étude du Budget Primitif 2024. Au total, une enveloppe d’1 milliards 300 millions d’euros pour conduire l’ensemble de nos politiques.

Olwen Dénès, co-président du groupe EFC

INTERVENTION DE POLITIQUE GENERALE

Groupe écologiste, fédéraliste et citoyen

L’an dernier, à l’occasion de notre session budgétaire, j’avais introduit mon discours de politique générale par quelques mots de soutien au mouvement intersyndical contre la réforme des retraites, mouvement historique qui n’a cependant pas trouvé l’oreille du gouvernement de l’époque, resté sourd aux revendications, propositions et opposition d’une majorité du pays. Le droit à une retraite digne et en bonne santé a depuis été rogné.

Ces derniers jours, deux grandes revendications sociales se font entendre dans nos rues et sur nos routes : celle du monde paysan qui lutte pour vivre de son travail et celle du monde enseignant qui subit une énième lubie gouvernementale avec la mise en place de classes de niveaux au collège, mettant encore plus à mal le sens de leur travail. Ils et elles nous nourrissent, ils et elles éduquent notre jeunesse. Ils et elles souhaitent vivre dignement de leur travail, retrouver de la confiance de la part de la puissance publique pour pouvoir exercer des métiers qui les passionnent et qui sont si essentiels notre société.

La mobilisation du monde agricole fut soudaine et forte mais n’a pas étonné grand monde, tant les indicateurs sont alarmants. Selon un rapport de la MSA en 2022, il y a 1.5 suicide par jour dans la profession tandis que 100 000 fermes ont disparu ces 10 dernières années. On a tenté de nous faire croire que l’écologie est responsable de la situation et qu’il est impossible de concilier agriculture et écologie. Mais qu’ont fait les majorités politiques au pouvoir depuis des décennies en France et en Europe ? Qui a négocié et voté les dernières PAC ? Qui a laissé la grande distribution et l’agro-business étrangler les paysans dans un rapport de force déséquilibré ? Qui a négocié et défendu les nombreux accords de libre-échange ? Ce ne sont ni les associations environnementales, ni les élu.es écologistes, mais bien les droites et les libéraux, parfois épaulées par l’extrême-droite comme pour le vote de la dernière PAC. Les propositions mises en avant par le gouvernement pour lever les blocages nous paraissent largement insuffisantes. Elles sont court-termismes et ne vont en rien enrayer la situation actuelle. Dans quelques mois, quelques années, une même colère s’exprimera de nouveau avec les mêmes revendications. Le vœu de soutien au monde agricole présenté par les groupes de la majorité qui sera débattu en fin de session tente d’apporter modestement des réponses à une situation désastreuse. Les rapports de force économique doivent être rééquilibrés en faveur des paysan.ne.s, ouvriers agricoles et salarié.es de l’agro-industrie. Ils et elles doivent pouvoir bénéficier de salaires corrects et les milliards de la PAC doivent être réorientés massivement pour accompagner la transition du secteur. La mise en pause du plan Ecophyto nous paraît également très dangereuse. La santé des citoyen.ne.s et des paysans eux-mêmes comme la préservation du vivant ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel de la réalpolitique. Pour l’ensemble des politiques publiques, nationales comme locales, il faut se doter d’objectifs clairs, s’y tenir et être exemplaires dans les actes pour mettre en œuvre la transformation écologique de notre société.

Pour notre collectivité, le budget 2024 dédié à la commission 1 qui sera présenté aujourd’hui permet de rappeler nos objectifs et engagements. Nous avons un plan de transition et nous avons des orientations pour notre Plan Alimentaire Territorial que nous devons amplifier. En 2023, le département a également acquis plus de 100 hectares pour ses ENS et poursuivra cette tendance en 2024. Le montant des financements pour la préservation des milieux aquatiques a quant à lui été multiplié par quatre depuis 2021, atteignant 2,8 millions en 2024.

Enfin, pour accompagner nos partenaires dans la transition, nos politiques volontaristes de la commission 1 vont également se poursuivre avec la déclinaison des pactes de mobilités locales qui complètent notre action forte de création d’aménagements cyclables mais aussi le renouvellement des dispositifs d’aides aux communes qui vient en complément de nos contrats départementaux de solidarité territoriale.

Pour ce qui concerne le plus gros bloc de la commission 2, notre collectivité, qui a comme première priorité les problématiques enfance-famille, va y consacrer plus de 219 millions d’euros cette année, en augmentation de 8,8% par rapport au budget primitif 2023, car les besoins ne cessent de s’accroitre dans notre département, comme sur l’ensemble du territoire national. Mais que dire quand d’autres partenaires publics vont à rebours du travail que nous effectuons auprès de ces jeunes. Je parle ici par exemple des conséquences de la loi immigration.

Cette loi est un désastre moral et politique, notamment pour la majorité présidentielle et la droite républicaine, mais c’est aussi une attaque contre une partie de nos concitoyen.ne.s. L’article 44 de cette loi prévoit que certains jeunes majeurs, anciennes et anciens MNA accompagnées par notre collectivité et qui vont se voir priver de contrats jeunes majeurs à l’issue de leur parcours au sein de l’Aide Sociale et l’Enfance. C’est une régression importante.

Toujours pour la commission 2, les politiques éducatives et de la jeunesse vont quant à elles être financées à hauteur de 73,7 millions d’euros de fonctionnement et d’investissement. Notre ambition d’émancipation, d’éducation populaire et de mixité sociale perdure et elle se traduit largement dans ce budget. Cependant, nous ne pouvons qu’être très inquiets, comme le monde enseignant, sur l’arrivée des classes de niveau en mathématiques et de français en 6ème et en 5ème dès la rentrée prochaine. Pédagogiquement nulle, cette mesure est une attaque contre la mixité sociale et scolaire et va en plus fragiliser l’organisation pratiques et quotidiennes des collèges. Plutôt que de vouloir généraliser un Service National Universel inutile à 2 ou 3 milliards d’euros, il serait de bon sens de remettre enfin des moyens humains dans les établissements.

Nous sommes la collectivité cheffe de file des solidarités, et les politiques de la commission 3 vont peser plus de 495 millions de crédits de fonctionnement dans notre budget 2024. Forts du vote de notre schéma de l’autonomie et du plan bretillien d’insertion en 2023, cette année verra les premières traductions concrètes de nos nouvelles orientations avec des crédits en augmentation de 5,1%.

Autre annonce nationale, celle de Gabriel Attal sur l’éventuelle prise en compte des logements intermédiaires dans le calcul du quota de 25% de logements sociaux, nous inquiète. Pire que l’inaction, cette mesure mettrait à mal le monde du logement social et les efforts conjoints des bailleurs et de beaucoup de collectivités. Pour notre politique départementale de l’habitat, nous allons allouer 16 millions de crédits en 2024. C’est notre contribution forte pour tenter de palier les demandes de plusieurs dizaines de milliers de personnes qui sont en attente d’un logement social en Ille-et-Vilaine.

Ce budget 2024 reste ambitieux, malgré les contraintes budgétaires fortes qui pèsent sur notre collectivité cette année. Nous avons dû faire des choix, différer des projets mais nous tenons le cap de notre projet de mandature. Mais cette situation n’est pas tenable à long terme. Il faut une remise à plat des financements des collectivités et une réelle concertation d’un certain nombre de politique publique comme celle du grand âge et de la dépendance. Notre épargne nette projetée sera en baisse, passant de 27 millions en 2023 à 10,8 millions cette année.  Cependant, malgré les contraintes budgétaires actuelles, nous ne rognons pas sur nos engagements vis-à-vis des bretilliennes et bretilliens. Nous allons voter aujourd’hui le premier schéma de promotion des langues de Bretagne de notre collectivité. Plus qu’un gadget ou un engagement folklorique, ce schéma est la première pierre d’une politique linguistique ambitieuse pour l’Ille-et-Vilaine, en accord avec les demandes de la société civile. Il se décline en quatre axes : la communication, l’enseignement, la formation et l’accompagnement des acteurs. Le plurilinguisme est un trésor, une chance, à nous d’accompagner son développement. Nos langues sont en danger, nous le savons. Pour les sauver, il faut pouvoir les faire vivre partout sur le territoire.

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